Candy Crush Saga a refait son apparition sur les Unes du monde entier cette semaine, après l’annonce du rachat de son créateur (King Entertainment) par Activision Blizzard. La somme astronomique de 5.9 milliards de dollars, annoncée pour cette transaction de nature historique, ne serait-elle pas trop élevée pour ce que vaut Candy Crush à l’heure actuelle, mais aussi à l’avenir ?
Vous en avez forcément entendu parler cette semaine : King, éditeur responsable du jeu mobile/facebook Candy Crush Saga, a été racheté par le groupe Activision-Blizzard, pour un montant évalué à 5.9 milliards de dollars (5.4 millions d’euros).
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Lorsqu’une transaction de ce type est effectuée, que ce soit dans le monde des jeux vidéos où sur n’importe quel autre marché, l’objectif de l’acheteur est toujours le même : tirer profit de l’image de la marque ou de l’entreprise rachetée, de sa base clientèle (les joueurs pour King) et de son portefeuille de produits (Candy Crush et tous ses « successeurs »).
Un rachat record
Ces 5.9 milliards représentent la plus grosse somme jamais payée pour le rachat d’une boîte de jeu vidéo spécialisée dans le mobile et les réseaux sociaux.
En 2010, PoPCap (Plants Vs Zombies) était racheté par Electronic Arts pour 455 millions d’euros.
Cinq ans plus tard, au début de cette année 2010, le nouveau venu Supercell a profité de la montée en puissance de son jeu Clash of Clans pour attirer les faveurs du Japonais Softbank, qui a déboursé un total de 2,3 milliards en deux transactions, pour acheter 73.2% des parts de l’entreprise.
En ce mois de Novembre 2015, Activision explose donc les records précédents et sort 5.4 milliards d’euros pour racheter King Entertainment.
Avec une telle somme investie, on pourrait penser que Activision s’est attaché les services d’une véritable poule aux oeufs d’or, prête à multiplier les revenus générés par le groupe dans son ensemble. Mais c’est loin d’être le cas.
Un avenir précaire pour King
King, depuis de longs mois maintenant, a entamé une période inévitable de déclin. Sur le marché mobile, extrêmement instable, aucun grand nom n’a réussi a confirmer après avoir fait son premier gros hit.
Rovio (Angry Birds), n’a jamais réussi à trouver un successeur à ses oiseaux en colère. Zynga (Farmville) s’est contenté de sortir copies après copies de son propre jeu, finissant par voir sa popularité, sa valeur en bourse et ses revenus dégringoler en flèche.
Suivant la même tendance décevante, King Entertainement a fait tout son possible pour repartir de l’avant en sortant plus de 200 jeux au total. Mais à part la suite directe de son Candy Crush, aucune de ses tentatives n’a été courronnée de succès et son avenir semble plutôt précaire.
Sur le troisième trimestre 2015, les chiffres communiqués par l’entreprise britannique ne laissent pas présager du meilleur dans les mois à venir. Pour ses DAU (Joueurs Journaliers Moyens), MAU (Joueurs Actifs Mensuels) et MUU (Joueurs Uniques Mensuels), l’entreprise a déclaré des chutes respectives de 3%, 4% et 5% par rapport à l’année 2014.
Si la dégringolade se confirme, King pourrait emboîter le pas à Rovio et Zynga, qui ont déjà du procéder à des licenciements massifs ces derniers mois pour limiter la casse au niveau financier.
Une confiance aveugle d’Activision ?
Pourtant, malgré tous ces mauvais signes, qui ne devaient certainement pas lui être inconnus, Activion-Blizzard a fait le choix de casser sa tirelire pour racheter King et Candy Crush.
Pour espérer un début de retour sur investissement, le groupe spécialisé dans les jeux vidéos sur console et PC devrai prier pour ne pas voir le chiffre d’affaire de King diminuer trop rapidement. Ce qui est tout sauf garanti.
Dernièrement, on apprenait que le spécialiste mobile avait enregistré un chiffre d’affaire de 500 millions de dollars par trimestre. A ce rythme, les quasi 6 milliards pourraient être amortis en environ 3 ans par Activision… si un désastre ne se produit pas.
Ce genre d’instabilité, ce côté imprévisible, Bobby Kotick avait pourtant confié qu’il s’en méfiait. Interrogé en 2010, le président d’Activision avait expliqué :
Les jeux mobiles et portables, les jeux sociaux, les jeux sur réseaux sociaux, tout ce dont on entend beaucoup parler à l’heure actuelle, sont intéressants et présentent des avantages pour le marketing et le développement des marques. Mais ils n’ont pas encore de modèle économique démontré, le marché est chaotique et la barrière à l’entrée est presque inexistante
Ce côté chaotique du marché, il est toujours présent. Aucune entreprise n’arrive à s’installer en leader du marché sur le long terme, les succès des jeux sont éphémères et impossible à reproduire et les échecs sont fréquents.
Un pari dangereux
C’est un pari très risqué qui a été fait par Activision. Un pari qui mise sur la croissance constante du marché mobile, que beaucoup de spécialistes considèrent comme l’avenir du jeu vidéo. Mais un pari qui ne prend pas en compte le fait que le marché mobile n’est pas personnifié par une seule entité.
Cette croissance constante, qui devrait passer d’une valeur de 39 milliards (2015) à 55 milliards de dollars (2019), on la doit à l’arrivée permanente de nouveaux acteurs du marché. Un leader s’écroule et laisse sa place à un petit nouveau, inconnu jusque là.
Ce destin, déjà plus ou moins tracé pour King et Candy Crush, Activision y a accordé sa confiance en misant ses milliards d’euros, tel un jeune marié qui veut oublier un moment ses responsabilités en partant à Vegas.
Seul l’avenir nous dira si ce pari était gagnant. Mais les signes sont tous sauf encourageant pour tous ceux qui sont impliqués, aussi bien King avec Candy Crush, que Blizzard et Activision.
Sources :